Le chassé-croisé de la fin août

Transferts. Bison futé voit rouge, cette semaine sur le marché des transferts rennais. À deux semaines de la fin du mercato, les dossiers se sont enfin décantés. Alors que Alexander Tettey part pour l’Angleterre, et qu'il ne devrait pas être le seul, Jean II Makoun fait le voyage inverse, prêté par Aston Villa.

Les vacances estivales touchent à leur fin. Le mercato, particulièrement calme cette année, également. Annoncé comme l’un des gros dossiers de l’été, celui de Yann M’vila continue de traîner. La faute, sans doute, aux demandes financières très élevées du Stade rennais, pour des clubs qui hésitent à prendre le risque de dépenser beaucoup pour un joueur dont la cote a baissé.
L’arrivée en prêt de Jean II Makoun ne demandait plus qu’un départ. La logique aurait voulu qu’il s’agisse de M’vila, mais c’est finalement Alexander Tettey qui a fait ses valises en premier.

Ex-nouvel Essien

Moins attendu que celui de M’vila, le départ de l’international norvégien n’en est pas moins logique. Alexander Tettey arrivait dans sa dernière année de contrat, et il n’a pas réussi à convaincre lors des trois premières.
Il est loin, très loin, ce jour d’août 2009, lors duquel le Stade rennais avait enfin pu présenter fièrement sa nouvelle recrue, un jeune milieu de terrain prometteur venu de Rosenborg. « Tettey, le nouvel Essien ? », avait alors titré L’Équipe, pour présenter le néo-Rennais.

Il est vrai que son profil semblait plutôt prometteur. Un jeune international, que son club d’origine aura eu toutes les réticences du monde à laisser partir, et dont les images du championnat norvégien laissaient entrevoir un joueur capable de se lancer vers le but adverse, et doté d’une belle frappe de balle. Un milieu "box to box", comme disent les Anglais. Sitôt arrivé à Rennes, Frédéric Antonetti avait immédiatement suivi Pierre Dréossi en Norvège, afin de superviser sa future recrue. Il aura attendu deux mois avant de le voir débarquer en Bretagne. « C’est un milieu de terrain qui a la possibilité de se projeter vite vers l’avant, avait soufflé l’entraîneur rennais lors de la présentation du joueur à la presse, le 4 août 2009. Il est bon dans la récupération. C’est un joueur très actif et puissant. On peut le qualifier de milieu de terrain complet ». Et Pierre Dréossi de surenchérir : « C’était "le" joueur que l’on recherchait. Il correspond à l’équilibre que Frédéric Antonetti recherche dans son équipe ».

« On n’a pas vu le vrai Tettey »

Une recrue qui n’aura pas tenu les belles promesses formulées ce jour-là. Dès son premier match sous les couleurs rennaises contre Saint-Étienne (1-0), près de cinq semaines plus tard (en raison - déjà - d’une blessure à la cuisse), Tettey se montre plutôt timoré, multipliant les passes en retrait là où l’on attendait de l’allant et de la percussion.
Des débuts presque révélateurs de la personnalité du Norvégien. Très timide, il peine à s’intégrer au groupe professionnel rennais. Du reste, ses performances déçoivent, et il ne s’impose pas comme le titulaire attendu. « On est déçu, parce que le Tettey que l’on a actuellement ne correspond pas à celui que l’on a vu, analyse Dréossi à l’issue de la saison 2009-2010. On l’a suivi pendant pratiquement un an et demi. On verra l’année prochaine comment ça va se passer. Entre-temps, il aura eu des vacances, il n’en a pas pris depuis un an et demi. On espère voir le vrai Tettey, celui qu’on a vu en équipe nationale et en Ligue des champions ».

Le "vrai Tettey", les supporters rennais ne l’auront finalement vu que par bribes. Quelques coups d’éclats ponctuels, et un très bon mois de janvier 2011, qui le voit marquer quatre buts, dont trois en Coupe de France, et distribuer une passe décisive. Ironiquement, cette belle période se clôt sur un épisode rocambolesque, lorsqu’il se voit obliger de suppléer Nicolas Douchez dans les buts rennais, à l’occasion d’un déplacement catastrophique à Sochaux où le portier est expulsé par l’arbitre (1-5). Finalement, c’est peut-être cette image que l’on retiendra d’Alexander Tettey, tentant vainement d’arrêter le penalty tiré par Boudebouz. « Personne ne voulait y aller, expliqua-t-il ensuite à la presse. Je n’avais jamais été gardien, pas même à l’entraînement ».
Qui sait si le Norvégien aura à enfiler les gants une deuxième fois à Norwich, où il évoluera désormais. Dans un championnat qui pourrait davantage correspondre à ses qualités, le sympathique milieu de terrain pourra - peut-être - s’exprimer pleinement.

L’expérience de Makoun

Dans l’autre sens, c’est Jean II Makoun qui débarque au Stade rennais, après une semaine et demie d’interrogations sur son sort. Une arrivée sous forme de prêt, qui a donc l’allure d’une solution à court terme en attendant de voir si son option d’achat sera levée en fin de saison. S’évitant de devoir assumer tout seul un très gros salaire (il en payera la moitié), le Stade rennais reste dans le circuit de ses recrutements de joueurs « à relancer », quand il s’agit d’éléments d’expérience.
Car de l’expérience, le Camerounais en a à revendre : près de 250 matchs de Ligue 1 disputés entre novembre 2002 et janvier 2011, une cinquantaine de rencontres européennes, et autant de sélections internationales. Un vécu principalement obtenu sous les couleurs de Lille et de Lyon, ce qui écarte évidemment tout problème d’adaptation.

Dans l’incapacité de s’offrir les services d’un joueur de ce genre en pleine possession de ses moyens (transféré de Lille à Lyon en 2008 pour près de 15 millions d’euros, tout de même…), le Stade rennais va donc tenter de le relancer. En partie tout du moins, car Makoun, après deux saisons difficiles, a retrouvé de l’allant la saison passée, sous les couleurs de l’Olympiakos. Stigmatisé par les supporters lyonnais, malgré une première saison plus qu’honnête dans le Rhône (35 matchs de L1 disputés, 6 buts), Makoun a joué de malchance en Angleterre, avec une blessure lors de ses six premiers mois, le départ de Gérard Houiller qui l’avait recruté, des soucis familiaux, et des problèmes d’adaptation. Âgé de 29 ans, il aura une revanche à prendre en retrouvant la Ligue 1, un an et demi après l’avoir quittée.

Association avec M’vila ?

Attendu comme le remplaçant de M’vila, Jean II Makoun sera d’abord celui d’Alexander Tettey. S’il va d’abord devoir retrouver la plénitude de ses moyens physiques, il pourrait bien être aligné au côté de l’international tricolore, dont le départ de Rennes est toujours attendu, mais encore loin d’être acquis.
Concrètement, alors que l’arrivée de Makoun était attendue comme une réponse, le fait qu’elle soit liée au départ de Tettey génère encore plus d’interrogations. Si le Stade rennais, comme la logique le voudrait, souhaite toujours voir le transfert de Yann M’vila se réaliser, procédera-t-il à un nouveau recrutement au milieu de terrain ? Choisira-t-il de faire confiance à son centre de formation, et notamment aux jeunes Axel Ngando et Abdoulaye Doucouré, qui frappent à la porte de l’effectif professionnel ?
Les onze jours qui restent pour boucler ce mercato estival permettront de répondre à ces questions. Largement le temps pour un nouveau chassé-croisé sur la route des transferts.

- Crédit photos : srfc.frenchwill.fr (Tettey) et Vladimir Maiorov (Makoun)