Il y a cent dix ans, jour pour jour, naissait le Stade rennais. Le 10 mars 1901, une bande d'anciens étudiants décident de s'associer pour s'adonner à la pratique du football et de l'athlétisme. Cent dix ans plus tard, ce club créé sans prétention existe toujours, malgré bien des péripéties.
À l’aube du XXème siècle, la pratique du football s’implante en Bretagne. Le jeu est importé par les Anglais de Jersey, qui marchandent dans les ports du Nord-Bretagne, de Saint-Malo à Saint-Brieuc. On joue alors sur les plages, mais la pratique gagne rapidement l’intérieur des terres, jusqu’à Rennes.
Quelques semaines avant la création du Stade rennais, le Football Club rennais voit également le jour. Les deux clubs fusionneront trois ans plus tard pour donner naissance au Stade rennais université-club (SRUC).
S’il n’est pas le club attitré de l’Université de Rennes (rôle qui sera dévolu à la section football du Rennes Étudiant Club, le REC), il se nourrit rapidement du statut universitaire de la ville pour s’attirer à lui quelques uns des meilleurs joueurs bretons... ou étrangers : en 1930, c’est pour continuer ses études et perfectionner son français que l’attaquant allemand Walter Kaiser pose ses valises à Rennes. Trois ans plus tard, il deviendra le meilleur buteur du premier championnat de France professionnel.
Prenant rapidement le dessus sur les autres clubs rennais, le SRUC acquiert ensuite plus difficilement la suprématie régionale. Après la Première Guerre mondiale, il prend de l’envergure en ouvrant son recrutement aux joueurs parisiens, comme le demi François Hugues, premier joueur à honorer une cape en équipe de France alors qu’il évolue au Stade rennais, en 1922. C’est l’époque où le club commence sérieusement à prendre une dimension nationale, parvenant d’ailleurs à atteindre la finale de la Coupe de France [1] en cette même année 1922.
En 1932, le passage au statut pro - voulu par le président Isidore Odorico - achève de placer le Stade rennais parmi les meilleurs clubs français quand le professionnalisme se met en place, après des décennies d’amateurisme marron [2]. Il devient aussi l’unique représentant breton du football professionnel, le plaçant comme « le » club de la région.
La suite, ce seront trente années de hauts et de bas, avant que l’arrivée de Jean Prouff comme entraîneur ne permette la conquête des deux victoires en Coupe de France, en 1965 puis 1971. Mais outre ces deux grandes dates, largement citées et détaillées dans la bibliographie consacrée au club, comment oublier celles des heures plus sombres, où le Stade rennais aura vu son avenir lourdement menacé ?
Car après les ors de 1971, Rennes négocie mal « l’après Prouff ». Devenu « Stade rennais football club » suite à la prise d’autonomie de la section football vis à vis du club omnisports, il tombe quatre ans plus tard en deuxième division. Pire, englué dans de graves problèmes financiers, il est au bord de la disparition en janvier 1978, avant d’être sauvé in extremis par ses dirigeants Alfred Houget et Gérard Dimier, et par le soutien de ses supporters. Sans eux, qui sait si l’on en serait aujourd’hui à fêter les cent dix années d’existence de ce « bon vieux » Stade rennais ?
Relégué dans les bas-fonds de la Division 2, il a en tout cas perdu alors de sa superbe. Depuis une dizaine d’années déjà, le FC Nantes pensé par José Arribas a conquis la France, et le vieux club rouge et noir voit également fleurir autour de lui une multitude de clubs bretons que le début de l’ère « open » [3] a poussé aux portes de l’élite. Brest, Guingamp, Quimper, puis bientôt Lorient ou même Saint-Brieuc, tous viennent concurrencer un Stade rennais jadis hégémonique. Tous se construisent une histoire, tous fidélisent un public.
La concurrence est d’autant plus rude qu’un peu plus au sud le voisin nantais prospère, quand Rennes entame une longue période d’ascenseur. Le trou d’air des années 1970 fait décidément très mal, d’autant qu’il est tombé à un bien mauvais moment. À une époque où certains clubs commencent à développer une politique de formation, à une époque où l’argent commence à prendre une importance considérable dans le football français, le Stade rennais s’accroche pour monter ou ne pas descendre, le tout avec un budget restreint, et ne peut se permettre d’investir réellement dans son centre de formation.
Si des efforts considérables sont finalement consentis à la fin des années 1980, avec notamment la création de l’école technique privée Odorico, le club a un train de retard, et s’applique à le rattraper durant la décennie suivante.
Avec l’arrivée de Pinault en 1998, le Stade rennais change brutalement d’époque. La gestion « familiale » du club par la municipalité et par quelques entrepreneurs locaux laisse place à une gestion plus moderne, ou du moins plus en rapport avec les aspects d’un football business qui continue de prendre son essor. Après quelques années d’égarement sur le marché des transferts, les dirigeants choisissent finalement de construire avec patience plutôt que d’agir avec impatience, en s’appuyant sur des points forts que sont la formation ou des infrastructures largement modernisées.
Depuis que le Stade rennais a fêté son centenaire en 2001, s’est donc écoulé une décennie. Se dégagent de ces dix années une impression étrange, faite de tâtonnements, de rendez-vous manqués, de gâchis, mais aussi de progression ou encore d’espoir.
Une décennie qui avait débuté par cette greffe aussi ambitieuse qu’incongrue, d’un Christian Gourcuff ayant besoin de temps pour installer ses principes de jeu, mais dans un club trop impatient pour le laisser faire. Comme si le Stade rennais était resté coincé entre deux périodes, entre son souvenir romantique du jeu offensif prôné par Prouff, et la réalité plus abrupte et pragmatique de l’ère Pinault. La période Bölöni sembla concilier adroitement les deux, tout en commençant à cultiver cette image de club « loser », capable d’aller mettre une raclée à Lyon sur un triplé utakesque et de prendre une rouste monumentale à Nancy dans la même saison.
Car les incohérences et les déceptions n’auront pas manqué pendant ces dix années, mettant le moral et la motivation des supporters rennais à rude épreuve. De Fauvergue à Eduardo en passant par Quevilly ou plus récemment par Reims, les désillusions se seront succédées, plus cruelles les unes que les autres. Un syndrome qui aura perduré, quoi que fassent les différents entraîneurs et joueurs qui se sont relayé ces six ou sept dernières années.
Dans le même temps, et presque paradoxalement, il est indéniable que le club a fortement progressé. Encore « nouveau riche » en 2001, il a su se construire un nouveau statut, pour se retrouver parmi ceux qui ne se demandent pas avec anxiété chaque début de saison s’ils lutteront ou non pour le maintien. Les reins solides, grâce à l’assise financière du groupe Pinault et grâce au travail de formation, le Stade rennais part chaque année l’esprit tranquille, ce qui est relativement inédit dans son histoire.
Reste pourtant cette foutue marche à franchir, matérialisée par trente-secondes de trop à Villeneuve-d’Ascq ou par deux erreurs fatales à Saint-Denis. La conquête d’un trophée et/ou l’accession à la Ligue des champions sont toujours les deux objectifs à remplir pour concrétiser l’une des meilleures périodes de l’histoire du club.
Puisse la prochaine décennie voir le Stade rennais les remplir enfin, pour continuer à se dessiner un avenir radieux. Rendez-vous le 10 mars 2021 pour en faire le bilan.
- Claude Loire, Le Stade rennais, fleuron du football breton 1901-1991, Éditions Apogée, Rennes, 1994, 488 p.
- Claude Loire, Le Stade rennais, fleuron du football breton, volume II : 1991-1997, Éditions Apogée, Rennes, 1997, 104 p.
- Claude Loire & Virginie Charbonneau, Stade rennais FC, 100 ans en rouge et noir, l’album du centenaire, Éditions Apogée, Rennes, 2001, 123 p.
- Georges Cadiou, La grande histoire du football en Bretagne, Liv’Éditions, Le Faouët, 1998, 381 p.
- Jean-Paul Ollivier, L’aventure du football en Bretagne, Éditions Palantines, Plomelin, 2009, 240 p.
Légende photo : le Stade rennais UC en 1904.
Source : Claude Loire & Virginie Charbonneau, Stade rennais FC, 100 ans en rouge et noir, l’album du centenaire, Éditions Apogée, Rennes, 2001, 123 p.
[1] La Coupe de France était alors l’épreuve « reine » dans l’hexagone, puisque le championnat de France tel qu’on le connaît maintenant n’est créé qu’en 1932.
[2] L’amateurisme marron désignait la rémunération illégale de joueurs censés être amateurs, à une époque où le professionnalisme était ressenti comme un danger par certains dirigeants
[3] De 1932 à 1970, l’accession à la deuxième division est conditionnée par l’obtention par les clubs du statut professionnel. Il n’y a donc alors aucun système de promotion/relégation entre la D2 et l’échelon inférieur, à l’époque le CFA. Cette barrière saute en 1970 : c’est le début de la D2 « open ».
Louis G
10 mars 2011 à 08h22Je pense que la venue de Boloni aura constitué un déclic pour le Stade Rennais !...en plus de ses qualités d’entraineur, il a su mettre en valeur le Centre de formation... la bonne assise financière permise par le goupe Pinault et le Centre de formation sont les 2 piliers du Club : l’année 2010-2011 est là pour nous le montrer !!...
patrick
10 mars 2011 à 09h15et alors ! il est ou le beau maillot pour fêter tous ça ???
Nicopicolo
10 mars 2011 à 10h03Quel plus beau cadeau d’anniversaire qu’une victoire demain ?
Notre Stade Rennais à 110 ans, mais n’a jamais été aussi jeune !
Allez le Stade !!!!!!
Joyeux Anniversaire à notre club,
Le Stade Rennais à 110 ans aujourd’hui, c’est magnifique !!
Des sections sportives d’origine (Football, Athlétisme et...natation ...si si !!)
Il n’en reste que deux, le football et l’athlétisme.
Mais le Stade reste un club ommnisports qui vit puisque même si le hockey sur gazon a disparu à l’aube du 21e siècle, une nouvelle section des plus dynamique est née le Rugby (les filles sont 1ere en D1).
Cette identité omnisports à été oubliée par le football qui ne prend même plus la peine de délégué des représentants (4 postes dans les statuts) au bureau du Stade Rennais Association Générale.
Bon anniversaire.
B. Hélaudais (Athléte, Entraîneur, webmaster au Stade Rennais Athlétisme depuis 1978)
http://stade.rennais.free.fr
pourquoi ne trouverait-on pas un vêtement ou maillot célébrant cet anniversaire à la boutique..?????????
dommage....mais il n’est pas trop tard pour bien faire !!!
yoyoceltik
10 mars 2011 à 15h28On fêtes ça demain en battant marseille !!! :)
SRFC29 (ALF29)
10 mars 2011 à 22h03J’étais déjà supporter pour les 100 ans (j’avais 12 ans)... Et je suis toujours la pour les 110 et pour encore pas mal de temps (les 150 j’espère lol) mais par contre pas pour les 200 lol.
JOYEUX ANNIVERSAIRE LE STADE RENNAIS :) !!!!
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