Formé au Stade rennais avant de partir au Havre en 2010, Maxime Le Marchand a poursuivi sa carrière à Nice, Fulham, Anvers, puis Strasbourg. Contraint de prendre sa retraite en juin dernier suite à des problèmes de dos, le Malouin revient pour SRO sur sa relation avec Julien Stephan, qu’il a côtoyé au Racing, et évoque l’épreuve qui a été la sienne de devoir mettre un terme à sa carrière.
Le Havre - Rennes, c’est un match spécial pour toi ?
Bien sûr, ce sont deux clubs dans lesquels j’ai joué, même si Rennes je n’ai pas joué en pro et fait qu’un banc de touche. J’y ai été formé, donc c’est un peu mon club de coeur. Le Havre, c’est un club où j’ai passé 6 belles années qui m’ont fait évoluer en tant que joueur et en tant qu’homme. Ce sont forcément des clubs qui me marquent.
Quel regard portes-tu sur la saison des deux clubs ?
Je suis content pour Le Havre car il y a un travail énorme fait avec leurs moyens. Ils ont construit ça avec Matthieu Bodmer, le coach, tous les gens autour. Il y a quelque chose qui se reconstruit au niveau de ce club et c’est bien. Leur saison est plus que correcte pour une équipe qui vient de monter de Ligue 2 avec des joueurs qu’on ne connaissait pas plus que ça mais qui sont performants en Ligue 1. C’est une bonne première partie de saison pour Le Havre. Rennes a commencé c’était compliqué, il y a eu quelques mouvements mais ça reste un grand club. Ils se sont donnés les moyens pour remonter la pente et ils le font très bien. C’est une équipe dans une belle dynamique avec un coach que j’ai connu, qui est un très bon coach et on le voit parce que ce n’est jamais facile de revenir dans un club où on a déjà fait une histoire. Il a su le faire et pour le moment ça marche bien, j’espère que ça va continuer ainsi.
Quel coach a été pour toi Julien Stéphan à Strasbourg ?
Un coach qui est assez proche de ses joueurs, qui est dans l’échange et qui essaye de trouver les meilleures solutions pour l’équipe avec les joueurs qu’il a en place. Il écoute les joueurs mais il met quand même ses idées en place, et les joueurs adhèrent car il est sûr de lui. Il est assez cartésien, un peu mathématicien je dirais. C’est un très bon tacticien et moi j’ai trouvé que c’était un super coach à Strasbourg.
À Strasbourg ensemble, vous aviez connu le succès assez vite. Y a t-il une patte Stephan visible dès son arrivée ?
Il est arrivé en début de saison, moi je suis arrivé en août. Il y a eu quelques difficultés au départ, il fallait qu’il mette les choses en place. Je pense qu’il a eu un temps d’adaptation en fonction de ses joueurs, puis il a vu un potentiel dans l’équipe dans un autre système, en 5-3-2. À partir de là, il a fait ce recrutement en août, avec Frédéric Guilbert, Gerzino Nyamsi, et moi-même. Ça a étoffé un peu plus l’équipe dans ce qu’il voulait faire. Une fois que ça a été mis en place, c’est parti. Là c’est différent avec Rennes je pense. Parce qu’il connait le club, les joueurs un petit peu, il a eu le temps d’analyser les choses donc il savait quoi mettre en place pour être performant assez rapidement. C’est pour ça que ça a pris peu de temps pour être performant.
Dans le management, c’est quelqu’un qui vous emmène assez vite avec lui ?
Oui, dans le management il est très bon. C’est un coach complet autant tactiquement que dans le management. Il est assez proche des joueurs, a des discours pour leur donner confiance. Donner confiance aux joueurs, c’est l’outil principal je pense pour un manager. Et il est très bon. Dans ses causeries il sait motiver ses joueurs.
Tu le dis cartésien, est-ce que ça s’accentue notamment par l’importance donnée à la vidéo, via notamment Rudi Cuni (entraîneur adjoint à Rennes) ?
C’est une approche qui se fait de plus en plus dans le football moderne où la vidéo est de plus en plus utilisée. Avoir Rudi Cuni, ça correspond et ça appuie sa philosophie de voir le football sur le terrain, voir ça comme une partie d’échecs. C’est un peu logique que ça devienne son adjoint. Là-dessus, ils sont complémentaires.
Tu as vécu cette importance croissante de la vidéo. Ça parle à un joueur tout ce travail autour de la vidéo ?
Oui bien sûr, moi personnellement beaucoup, j’adorais ça. Les séances vidéo qu’on faisait, c’était génial. J’ai une réflexion un peu dans ce sens là. D’autres joueurs peuvent être un peu lâchés au bout de quelques minutes, alors que c’est important. Vraiment, les séances vidéo ce sont des séances d’entrainement. Où tu peux corriger, remettre en place à l’entrainement. Julien Stephan la rendait interactive. Il échangeait encore, était à l’écoute des joueurs sur le moment, pour avoir leur ressenti sur le terrain. J’ai connu (Frédéric) Antonetti qui l’utilisait aussi à Strasbourg et j’adorais aussi. Ça permet d’avoir du recul et savoir ce qu’on peut faire en fonction des déplacements de l’adversaire.
C’est un moment d’échange, la vidéo avec Julien Stephan ?
Il était toujours ouvert au dialogue. Bien sûr durant les séances vidéo, il corrigeait donc il avait ses directives. Après, il y avait des échanges si quelqu’un n’avait pas bien compris. Les joueurs n’hésitaient pas à prendre la parole et demander au coach car c’était dans un esprit constructif pour l’équipe.
Le 26 juin dernier, tu annonçais la fin de ta carrière (pour problèmes de dos). Comment ça va depuis ?
Ça va merci. Très honnêtement, ça reste difficile d’arrêter sa carrière, surtout sur une blessure. J’ai toujours un peu de mal à m’y faire. Mais j’ai des projets, je m’occupe l’esprit, je prépare les diplômes d’entraineur. Heureusement que je peux préparer ça, je suis un peu en contact avec le Racing Club de Strasbourg notamment à l’Académie où je peux être en immersion de temps en temps. Ça m’occupe parce que c’est difficile, vraiment, d’arrêter sa carrière de cette façon. On dit souvent que c’est une petite mort, mais c’est vrai que c’est difficile car en tant que joueur, tu vis des émotions très fortes, où tu as une pression sur le match que tu prépares, et tu vis autour de ça. Là, tu ne vis plus ça, tu en es détaché. Ces émotions fortes que tu pouvais ressentir, elles manquent. C’est une drogue en quelque sorte. Et c’est difficile à vivre. J’ai essayé de le préparer du mieux possible pendant ma carrière. Je voyais bien que j’y arrivais, mais on n’est quand même pas prêt. Quand ça arrive, c’est toujours difficile. Je vois mon corps qui change, j’ai perdu de la musculature. Ce n’est pas facile, mais heureusement j’ai ma famille, je suis bien entouré et j’ai de nouveaux projets.
On ne pense pas souvent à ce corps qui change après l’arrêt de la carrière…
Avec mon dos, je ne peux plus vraiment aller chercher du sport de haut niveau. Ça reste du sport tranquille. Je continue à m’entretenir mais le corps change. Je vois que j’ai perdu au niveau des jambes, du haut du corps. On se voit changer en 6-7 mois, ça te le rappelle.
Les premiers mois suivant l’arrêt de carrière sont les plus difficiles ?
Oui, quand il y a la reprise du championnat, on est encore un peu un ancien joueur professionnel, ça va. Mais je trouve que c’est encore dur maintenant. On se rend compte vraiment que c’est terminé, et qu’on ne pourra plus… J’avais peut-être en tête de reprendre à un niveau plus faible, mais c’était difficile de l’accepter. C’est encore difficile de se dire que c’est définitivement terminé, et qu’on ne pourra plus revenir vers ça. Ou j’espère en tant qu’entraîneur, mais ce sera dans plusieurs années.
À un moment, tu as envisagé de revenir à un niveau de National 2 peut-être ?
Il y a un moment oui. J’avais toujours mes douleurs au dos, mais avec le repos, mon dos allait un peu mieux et je me disais « il faut que je me remette en forme, que je refasse du foot, je ne suis pas bien, j’ai envie de refaire du foot ». Ma femme me disait « mais arrête, ça va pas, c’est fini » (rires). Effectivement, dès que je veux faire un peu plus de sport à intensité, j’ai tout de suite des douleurs qui reviennent et je ne pourrai plus aller vers ça. Je pense que ça fait partie du deuil du footballeur.
Est-ce qu’on arrive à continuer à regarder du foot dans ces moments ?
Oui bien sûr. Regarder du foot pas de problème, j’ai eu plus de mal à retourner à la Meinau. N’étant plus joueur, plus vraiment dans le club, c’est difficile d’avoir ce regard de supporter en quelque sorte. J’ai eu du mal mais j’y suis retourné. Maintenant je fais partie des anciens du Racing, je suis dans leur bureau, je suis un jeune ancien (rires). J’avais été invité pour Strasbourg - Le Havre justement (2-1, le 10 décembre). J’appréhendais un peu mais c’était un bon moment.
Tu regarderas Le Havre - Rennes dimanche ?
Bien sûr, je regarde la Ligue 1 et la Premier League. Je suis Le Havre, Rennes et Nice avec un oeil particulier. Quand tu y as joué, tu as toujours une attache un peu particulière.
On arrive à choisir un camp avant ce match à ta place ?
Difficile ! Même quand je regarde Nice aussi. Je suis partisan de voir un beau match de football, avec deux équipes qui jouent sur leurs forces. Après, Rennes ça reste mon club de coeur. Je suis né à Saint-Malo, c’est le club qui m’a formé. C’est où sont mes racines, notamment de footballeur.
Crédit photo : Maxime Le Marchand (Instagram)
Marcel Loncle
9 février à 06h21Interview très intéressante sur le mode de fonctionnement du coach et donc bien en ligne avec le fil de l’actualité rennaise. On attend maintenant celle de Romain Salin qui pourra revenir entre autre sur sa relation avec Le Déserteur.
Xavier
9 février à 09h15Belle interview ! quel énorme travail !
CondateFan
9 février à 10h32Excellente idée Marcel Loncle.
Mais avec cette fois, non pas Thomas Rassouli aux manettes mais, Guillaume Canet pour réaliser Romain et le Grand-Mou choir.
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