Et pourtant, il y avait la place

Ligue 1, Caen 1 - 0 Stade rennais. Analyse. Dans le froid du stade d'Ornano, le Stade rennais a buté sur une équipe caennaise regroupée en défense et habile en contre-attaque. Inexistante en première mi-temps à cause d'un milieu de terrain défaillant, l'animation offensive rennaise a soudain retrouvé des couleurs grâce aux rentrées de Leroy et Brahimi.

Terrain tout juste déneigé, température polaire, ballon et lignes couleur rose, les spectateurs de d’Ornano assistaient à un vrai match hivernal ce mercredi, entre les deux stades, Malherbe d’un côté, Rennais de l’autre. Qui dit match hivernal, dit souvent champ de patates, et la dernière rencontre de l’année 2010 n’aura pas fait exception.

D’aucuns diront que cette qualité de pelouse aura empêché l’équipe rennaise de développer son jeu, mais ce serait faire beaucoup d’honneurs à cette excuse. S’il faut retenir un paramètre ayant particulièrement gêné les plans rennais, ce serait plus volontiers le forfait de dernière minute de Jirès Kembo. Une nouvelle fois son nom était couché sur la liste des titulaires, une nouvelle fois l’attaquant ressentait des douleurs à l’échauffement.
Obligé de modifier son équipe, Frédéric Antonetti choisissait alors d’innover. Plutôt que de faire confiance - comme samedi dernier - à Brahimi pour animer le flanc droit, l’entraîneur rennais décidait de jouer la carte Tettey au milieu de terrain, faisant monter d’un cran Dalmat.

La faillite du milieu de terrain

Rétrospectivement, l’idée n’était pas foncièrement mauvaise. Doumbia et Tettey ont le coffre et les qualités nécessaires pour faire le piston entre M’Vila (placé devant la défense) et Montaño en pointe. On connaît les qualités de percussion de Doumbia plein axe, et Tettey, s’il n’a jamais pu vraiment montrer ce genre d’actions depuis son arrivée en Bretagne, est réputé pour ses montées offensives et ses frappes de loin.
Malheureusement, ce milieu de terrain « new look » fut une faillite complète en première mi-temps. Plus encore que d’habitude, Montaño se retrouva esseulé en attaque, rendant son jeu en pivot totalement stérile. Tettey - manquant certainement de rythme puisqu’il s’agissait de son deuxième match de la saison - fut totalement transparent, avec une influence dans le jeu proche du néant, et une incapacité criante à se projeter vers l’avant. Doumbia apporta un peu plus offensivement mais son mètre quatre-vingt-onze fut en grande difficulté sur le terrain gelé, et le jeune joueur multiplia glissades et approximations.
Comme si cela ne suffisait pas, M’Vila se mit pendant les quarante-cinq premières minutes au diapason de ses deux partenaires. Dans son habituel costume de chef-d’orchestre de l’équipe, il ne perdit pas son influence (100 ballons joués sur l’ensemble du match) mais montra dans son jeu de passes un déchet inhabituel et forcément très préjudiciable à son poste. Blessé à la main pendant l’échauffement, ce qui lui occasionna quelques problèmes d’équilibre, c’est d’ailleurs sur l’une de ses erreurs qu’Hamouma réussit à ouvrir le score.

Incapable de franchir le premier rideau défensif caennais, le milieu de terrain rennais ne rendit pas la tâche facile au secteur offensif. Camara, sur son côté gauche, fut sans doute le joueur le plus percutant en première mi-temps, mais demeure encore trop inefficace dans ses centres, et fut rarement trouvé par ses coéquipiers (22 ballons joués en 75 minutes). Dalmat, lui, montra que sa vraie place est bien au milieu de terrain. Ses qualités ne lui permettant pas de prendre la profondeur, il joua le plus souvent en pivot, tentant de combiner avec Danzé et d’éliminer par ses dribbles. Pas vraiment convaincant.
L’équipe rennaise tenant malgré tout la possession du ballon (plus de 70 % en première mi-temps), les Caennais ne pouvaient agir que par contre, et le joueront à merveille pendant une bonne partie de la rencontre. Dans ce genre de match, il est facile d’être séduit par l’équipe qui a les espaces pour elle, et qui finit par se procurer davantage d’occasions. Sevrés de ballon et obligés de courir après, les joueurs de Malherbe n’ont pourtant pas montré grand chose, sinon leur solidarité défensive. Quant aux Rennais, ils avaient largement de quoi remporter la rencontre, en jouant un peu plus haut et en se montrant plus inspirés dans les trente derniers mètres.

Coup de fouet créatif

Malgré la défaite, il faut bel et bien retenir des éléments positifs de ce match. Derrière, et malgré le but d’Hamouma, la défense a une nouvelle fois montré sa solidité, avec un Jean-Armel Kana-Biyik impressionnant de puissance, et un Mangane qui s’est appliqué à venir donner un coup de main au secteur offensif en multipliant les montées balle au pied. Mais la vraie satisfaction aura été le double changement opéré en début de seconde mi-temps, avec les sorties de Doumbia et Tettey pour les rentrées conjuguées de Leroy et Brahimi.
Depuis le début de saison, ce dernier n’a été aligné qu’en attaque, côté droit ou côté gauche, par Frédéric Antonetti. Tout laissait donc penser que Dalmat et Leroy allaient prendre place au milieu, avec Brahimi devant eux, avant que l’on ne s’aperçoive que le jeune franco-algérien s’était en réalité placé en meneur de jeu, son poste de prédilection.

Alors, le match changea radicalement de visage. Dalmat, auteur d’un match sérieux, retrouva plus de rayonnement, et un début d’entente technique avec Brahimi. Ensemble, les deux joueurs parvenaient enfin à passer cette première ligne défensive caennaise, et pouvaient dès lors s’appliquer à mettre la pression sur les buts de Thébaux.
Concentrant la défense malherbiste dans l’axe, l’attaque rennaise s’offrait aussi davantage de possibilités sur les côtés. Leroy et Danzé trouvaient ainsi plus d’espace côté droit, permettant de développer quelques offensives pour aboutir à des centres. Bref, c’est tout l’aspect créatif de l’équipe rennaise qui se trouvait soudain renforcé.

Bien sûr, tout fut loin d’être parfait, et ce constat optimiste mérite d’être nuancé. On ne pourra ainsi que regretter le manque de réalisme de l’équipe rennaise face au but, tout comme on arguera que la défense bas-normande n’est que la dix-septième de Ligue 1, qui plus est privée mercredi de son milieu défensif habituel Damien Marcq. Reste qu’en moins de quarante minutes, les Rennais se seront procuré presque autant d’occasions franches que sur l’ensemble des trois derniers matchs.
Manquant un face-à-face avec Thébaux en fin de match, Brahimi a malgré tout marqué des points, tant sa capacité à déséquilibrer une défense en s’y enfonçant plein axe a été criante. Souvent confrontée à des défenses regroupées, l’équipe rennaise n’a jamais semblé plus à même de parvenir à marquer sur action de jeu que ce mercredi avec son jeune milieu de terrain à la baguette. Assurément une piste de réflexion pour Frédéric Antonetti et la seconde partie de la saison rennaise.