Stade rennais : Hamari Traoré, il est une légende

Après six années passées au club, Hamari Traoré a quitté le Stade rennais pour la Real Sociedad. Le défenseur malien aura tout connu à Rennes, surtout des grands bonheurs. Son statut de légende n'est pas usurpé.

Il est le dernier à s’être présenté en zone mixte, le week-end dernier, après le succès du Stade rennais à Brest, celui de la sixième qualification européenne d’affilée pour les Rouge et Noir. C’était dimanche, déjà, quand Hamari Traoré a activé le mode mitraillette pour répondre aux quelques questions de la presse à minuit passé, et surtout choisi d’aller au-delà de sa timidité pour faire une déclaration d’amour : « Ce club, je l’aime. Je suis Rennais à vie. Les supporters ont toujours été là pour moi, même si je suis quelqu’un de timide qui ne s’exprime pas beaucoup, mais on a ce rapport de confiance. »

Un beau moment en zone mixte entre Benjamin Bourigeaud et Hamari Traoré, les deux légendes du club : « Viens, on va prolonger ! » #SRFC pic.twitter.com/yoYAOXjYf0

— Clément Gavard (@Clem_Gavv) June 3, 2023

Dans la foulée, Benjamin Bourigeaud, son compère de toujours, qui avait signé à Rennes le même jour que lui, le 14 juin 2017, est venu à la rescousse du défenseur malien en venant lui prendre la main au moment où il allait être question de son avenir. « On va négocier son contrat pour l’année prochaine, allez, on y va », avait lancé le héros du soir, laissant seulement le capitaine rennais souffler qu’il allait se poser « avec ses proches » pour « réfléchir ». Ce vent d’espoir s’est transformé en au revoir ce vendredi, quand l’officialisation du départ de Traoré est tombée en même temps que l’annonce de son nouveau club, la Real Sociedad. L’histoire entre le défenseur et le Stade rennais est désormais à conjuguer au passé et son statut de légende est mérité.

L’homme des grands bonheurs

Arrivé de Reims en juin 2017 contre un peu plus de deux millions d’euros, Hamari Traoré a débuté son aventure rennaise avec une prouesse, celle de réussir à s’installer dans le couloir droit réservé à la coqueluche Romain Danzé depuis de nombreuses années. Pas une mince affaire, quand on sait que les candidats ont été nombreux avant le Malien, laissant presque planer la légende d’une malédiction touchant les concurrents du Finistérien. Il n’y avait rien de mystique autour de Traoré, recruté par le tandem René Ruello-Christian Gourcuff, un latéral droit fiable, solide et plus technique qu’on n’a pu le faire croire, ses nombreux tirs en tribunes ne lui rendant peut-être pas hommage pendant un temps. Hamari Traoré a tout connu à Rennes : des crises institutionnelles (la démission de Ruello, la mise à la porte d’Olivier Létang), quatre entraîneurs (Gourcuff, Sabri Lamouchi, Julien Stéphan et Bruno Genesio) et surtout quelques grands bonheurs.

Hamari Traoré, légende du Stade Rennais s'en va. #MerciHamari

6⃣ saisons
6⃣ qualifs UEFA
CdF 2019

8⃣8⃣ capitanats, 10e
2⃣3⃣9⃣ matchs, 18e
113 V - 49 N - 77 D

6⃣ buts
2⃣2⃣ passes décisives, 1er défenseur
1 c. Fenerbahçe
54, record

https://t.co/VsJ6ks7vgv pic.twitter.com/REdsLSOemd

— ROUGEmémoire SRFC (@ROUGEmemoire) June 9, 2023

C’est simple, depuis son arrivée au club aux côtés de Benjamin Bourigeaud, Rennes s’est toujours qualifié en Coupes d’Europe. Il était d’ailleurs là conte le Betis à l’hiver 2019, mais pas contre Arsenal à domicile, en raison d’une suspension l’obligeant à laisser sa place à Mehdi Zeffane. Il était bien sûr là à Saint-Denis, ce soir béni de mai 2019, quand les Rouge et Noir ont renversé la montagne Paris Saint-Germain pour remporter une Coupe de France inespérée, enfin. C’était d’ailleurs lui, à la 40e minute, qui avait relancé le suspense en feintant Juan Bernat côté droit, avant de voir son centre dévié dans son propre but par Presnel Kimpembe. Ce sont des moments que l’on n’oublie pas, comme son premier but sous la tunique rennaise, une frappe dantesque au stade Parsemain de Fos-sur-Mer face à l’Athlético Marseille, en Coupe de France, le 19 janvier 2020. Un bijou qui lui avait donné la recette, puisqu’il en a ensuite planté cinq autres contre l’OM, l’OL, Metz, Lorient et face au PSG, le tout dernier en janvier pour la victoire au Roazhon Park.

Rennais à vie

Plus que les buts ou les passes décisives (22 au compteur), il y a tout le reste et surtout la fidélité d’un homme à son club. 239 matchs qui font de lui le 18e joueur le plus capé dans l’histoire du SRFC (Rouge Mémoire). Hamari Traoré n’a pas toujours été aussi aimé que Benjamin Bourigeaud, même s’il ne faut pas sans doute pas tout comparer, et il a parfois été incompris, la faute peut-être à sa discrétion et à sa communication. Sa nomination comme capitaine par Bruno Genesio au départ de Damien Da Silva à l’été 2021 avait même provoqué du scepticisme chez les supporters et les observateurs. Celui-ci a été balayé tout au long des 88 rencontres lors desquelles il aura enfilé le brassard à son bras gauche. Plus qu’un excellent joueur à un poste où les très bons ne courent pas les prés, il aura été un élément essentiel dans le vestiaire rennais, faisant souvent le lien entre les plus anciens et les plus jeunes, qu’il aimait appeler « ses petits ». Chaque prise de parole de l’un de ses membres de la classe biberon devant la presse était une belle occasion pour eux de rappeler l’importance de Traoré dans leur évolution. « Hamari m’a beaucoup apporté, c’est comme un grand frère », disait par exemple Warmed Omari en mars.

Le même mot utilisé par Lorenz Assignon, son concurrent et successeur comme latéral droit, chez Ouest-France il y a un an : « C’est vraiment ça, le grand frère, il n’y a pas d’autre mot pour définir Hamari. Ça aide. Avec l’expérience qu’il a, il peut me replacer sur quelques actions où j’étais mal orienté, ce que j’aurais pu faire ou pas. C’est un accompagnement. Je suis hyper heureux de le voir faire une saison comme ça. » Il faudra faire sans lui la saison prochaine, ce qui devrait faire bizarre à tout le monde, de ses coéquipiers aux supporters. Son ovation à sa sortie à la 84e minute du match contre Monaco était bien un adieu au Roazhon Park et à son public. « Quoi qu’il advienne, merci pour tout Capi ! », avait affiché sur une banderole le Roazhon Celtic Kop dans le parcage à Brestune semaine plus tard. Hamari Traoré a joué son dernier match en rouge et noir dans le Finistère.

Chère famille du Stade Rennais… pic.twitter.com/X4El6GCsXd

— Hamari Traore (@hamari27) June 9, 2023

La fin aurait-elle pu être repoussée ? Le latéral droit, qui aurait pu s’en aller l’été dernier, avait envoyé des messages aux dirigeants sur leur silence à moins d’un an de la fin de son contrat, avant de recevoir au printemps une proposition qu’il n’a donc pas acceptée pour filer à la Real Sociedad, le club basque qui jouera la Ligue des champions la saison prochaine. Dans un message publié sur les réseaux sociaux, il a dit au revoir à « la famille du Stade rennais » avec une conclusion adressée aux supporters : « Vous êtes le cœur et l’âme de ce club. Votre soutien indéfectible, votre passion et vos chants retentissant dans les tribunes ont été une source de motivation exceptionnelle. Vous êtes les vrais héros du Stade rennais. » À 31 ans, Hamari Traoré a choisi de découvrir de nouveaux horizons, loin de sa maison d’adoption, et il n’y a même pas de regrets à avoir, seulement des sourires au moment d’ouvrir la boîte à souvenirs. L’histoire a été belle.