M’Vila poursuit son ascension

Indispensable à Rennes, Yann M'Vila s'impose également comme une pièce importante en équipe de France. Avec l'Euro 2012 en point de mire, le milieu de terrain semble déjà presque indiscutable chez les Bleus. Pourtant, au su de sa grande marge de progression, les axes de travail restent nombreux.

Titularisé ce vendredi soir par Laurent Blanc, Yann M’Vila a fêté sa quatorzième sélection en équipe de France face à l’Albanie. Ce total fait désormais de lui le joueur ayant obtenu le plus de capes avec les Bleus tout en évoluant au Stade rennais, devant Jean Prouff.
Une performance qui lui réserve d’ores et déjà une place particulière dans l’histoire centenaire du club, avant qu’il ne s’attaque - peut-être à l’avenir - aux 92 sélections de Sylvain Wiltord (record sur une carrière entière pour un joueur formé chez les "Rouge et Noir").

Jamais un élément issu du centre de formation n’avait atteint aussi vite un tel niveau. Pré-sélectionné, avant même ses vingt ans, par Raymond Domenech pour la Coupe du monde 2010, M’Vila a depuis accompli un chemin considérable, et obtenu une énorme reconnaissance publique et médiatique.
Bien sûr, tout n’a pas été simple, le milieu de terrain ayant connu beaucoup de hauts, mais aussi des bas, avec un creux lors de la deuxième partie de saison 2010-2011, et quelques performances en-dedans chez les Bleus. Avec son but en Albanie, le dernier rassemblement en équipe de France semble lui avoir donné un coup de fouet, entraînant en conséquence un très bon mois de septembre avec le Stade rennais. Taille patron, M’Vila a de nouveau retenu l’attention des médias cette semaine, avant de retrouver l’équipe albanaise hier soir.

« Je n’ai plus peur »

« Je ne suis pas installé, mais j’ai pris énormément d’assurance, reconnaissait le Rennais, interrogé dans les colonnes du Parisien ce jeudi. Je n’ai plus peur comme avant de tenter un geste ou une passe en me disant « Fais gaffe, si tu te rates, tu peux perdre ta place ». Cela me permet d’oser plus de choses ».
Sa place, M’Vila l’a gagnée sur le terrain, si bien qu’il fait désormais partie des meubles, alors qu’il a encore l’âge de jouer avec les Bleuets. « Je ne vais pas mentir : maintenant, je ne me pose plus trop de questions avant l’annonce des listes du sélectionneur », avoue t-il. Moins de frissons donc qu’à l’annonce d’une liste de pré-sélectionnés pour la Coupe du monde, ou d’une première convocation pour un amical face à la Norvège. Presque sans mal, le milieu rennais a écarté la concurrence d’un Alou Diarra pourtant bien connu du sélectionneur. « C’est un grand capitaine, la personne que j’apprécie le plus chez les Bleus. Il me conseille tout le temps », affirme pourtant M’Vila, bon camarade envers l’ex-Bordelais.

« Il a un destin international et je ne vois pas qui peut lui prendre sa place en équipe de France », confirme Antonetti, qui ne rate jamais une occasion d’encenser son protégé. « À son poste, il y a peu de joueurs de sa qualité en Europe », continue l’entraîneur rennais, qui n’hésite pas à affirmer que le jeune international est « un mélange de grands milieux défensifs », possédant « la compréhension du jeu de Claude Makelele, la force de percussion de Patrick Vieira et la qualité de passe de Yaya Touré ».
Didier Deschamps, interrogé par France Football ce vendredi, ne tarit pas non plus d’éloges à son sujet, et compare également M’Vila avec le milieu de terrain ivoirien. « Il me fait penser à Yaya Touré, époque Barça. Mais avec une exécution plus importante », commente l’entraîneur de l’Olympique de Marseille. Héritage de son passage en Italie, le technicien le compare aussi avec un célèbre international transalpin. « Ce n’est ni un pur milieu défensif, ni un pur relayeur. Il est les deux à la fois. À vrai dire, il correspond à ce que les Italiens appellent le "regista". Le premier relanceur. Celui qui fait jouer l’équipe de derrière, comme Pirlo. À ceci près que M’Vila récupère plus de ballons que Pirlo et qu’il est plus rapide ».

Deschamps : « Il voit, et il voit avant »

Visiblement conquis par le joueur rennais, l’ancien milieu de terrain de l’équipe de France loue la précocité de son successeur en Bleu. « Il a quelque chose de rare pour son âge : il voit, et il voit avant. Or, le plus dur, c’est justement ça : lire le jeu, savoir prendre l’information. Ensuite, pour faire, il faut avoir la qualité de passe, la technique et la vitesse d’exécution nécessaires. Lui, il a les deux ».
S’il s’est vite affirmé comme un milieu défensif de premier choix, M’Vila n’a eu de cesse depuis la saison dernière de travailler son apport offensif. Un travail de fond ciblé par Frédéric Antonetti, et qui a commencé à se concrétiser début 2011. Depuis, le milieu de terrain commence à distiller régulièrement quelques passes décisives, mais parvient également à marquer. Des efforts couronnés par le but marqué à Tirana début septembre. « Quand j’ai inscrit un but avec les Bleus en Albanie, c’était... magique. Voilà, c’est ça. Avec ma première sélection, ce but est mon plus grand souvenir », explique M’Vila.
Sans que cela se retrouve sur sa feuille de statistiques, le Rennais se retrouve également au départ de plus en plus d’actions offensives. Contre Nancy, c’est lui qui lance Pitroipa dans la profondeur, ce dernier servant ensuite Montaño pour l’ouverture du score. À Sochaux, c’est également lui qui décale Théophile-Catherine côté gauche, pour une action qui aboutit au but de Féret.

Bref, pour ceux qui en douteraient encore, M’Vila est véritablement devenu le baromètre de l’équipe rennaise. Une formation qui se met au diapason de son chef d’orchestre, aussi bien quand celui-ci prend toute la lumière que quand il passe un peu dans l’ombre. Car quand M’Vila est bloqué et ne trouve pas de solution, c’est tout le Stade rennais qui tousse.
Troisième capitaine des "Rouge et Noir" derrière Kader Mangane et Romain Danzé, Yann M’Vila a plusieurs axes de travail pour cette saison. En continuité de l’année précédente, il semble évident que son apport offensif doit continuer à s’améliorer. Mais le jeune milieu, patron sur le terrain, doit s’affirmer comme l’un des leaders de l’effectif rennais, et surtout travailler sa régularité et la gestion de ses efforts. « Il doit mieux canaliser son volume de jeu et son énergie pour être plus efficace », abonde Deschamps. Une gestion qui sera d’autant plus importante avec la cinquantaine de matchs qui attendent le Stade rennais cette saison, auxquels s’ajouteront ceux disputés avec les Bleus... dont pourquoi pas l’Euro en fin de saison.

Déjà très proche du gratin européen, M’Vila devra travailler pour gommer ce défaut. « Avec le temps et l’expérience, ça viendra », prédit Deschamps. Qui est mieux placé que lui pour connaître toutes les subtilités du poste ?

- Crédit photo : srfc.frenchwill.fr