Alexandre Even, point final
Publié le 23 avril 2014 à 21h55 parCFA2. Dans quelques semaines, ce milieu défensif, âgé de vingt ans, donnera un coup de volant à sa carrière. Amateur, aspirant puis stagiaire au Stade rennais, Alexandre Even, un des joueurs les plus réguliers de la saison en CFA2, tourne le dos à sa formation d'apprenti footballeur, pour s'ouvrir un nouvel horizon. Incertain à l'heure qu'il est...
Dans la vie, toute histoire à une fin. Mais, en général, elle amorce toujours le départ de quelque chose. Bien malgré lui, Alexandre Even s’apprête à fermer la parenthèse stadiste, préparé par l’éventualité de passer à autre chose. Il y a deux semaines, le verdict est tombé. Sans appel. À l’arrivée, pas de contrat pro, l’objectif qu’il s’était fixé depuis toujours. Par rapport aux années précédentes, le procédé établi par le club fut moins cruel, plus humain, envers ces jeunes qui caressent l’espoir de vivre un jour ou l’autre de leur passion. Il n’y aura pas eu de longue attente devant la porte de leur appartement, en restant à l’affût de chaque bruit et foulée provenant du couloir, pour pêcher le facteur dans leur filet.
Trois semaines avant l’échéance habituelle, celle du 30 avril, le Stade rennais avait proposé un rendez-vous, sorte de bilan, à chaque stagiaire dans le but de les mettre au parfum de la décision finale, qui concernait bien évidemment leur avenir.
Depuis son éviction, Alexandre Even tente de digérer la déception. À son rythme. « Ce n’est pas facile à vivre, dit-il. Mais il ne faut pas s’arrêter là-dessus. J’ai quand même passé cinq ans ici. J’avais mes repères et c’est difficile de les perdre, c’est sûr. Mais c’est comme ça... » Une sentence dépourvue de surprises quelque part, même si sa prise de volume se faisait sentir cette saison. « Je m’y attendais. C’est vrai que je sors d’une bonne année, mais je savais que Rennes ne comptait pas sur moi à long terme. Je n’ai pas pris de claque. Cette année, j’ai rempli mon objectif : jouer beaucoup de matches en CFA2, voir ce que c’était, et j’y suis parvenu. »
La preuve. Jusqu’ici, il est le seul joueur du groupe espoirs à avoir participé à l’ensemble des matches de la réserve, en appui devant la défense, certainement son meilleur poste où il détient un arc de passes diversifiées, en relayeur ou bien au poste de latéral droit, comme dernièrement face à Hérouville (2-2, le 12 avril). Une saison au cours de laquelle ce milieu de terrain a repoussé quelques limites, s’est fait violence, battu aussi pour mettre la concurrence hors état de nuire. En début de saison, avec Ahmad Allée dans les pattes, qui lui avait déjà piqué une grosse part du gâteau en Coupe Gambardella l’année d’avant, il n’était pas écrit que le franco-allemand coule une vie paisible. D’ailleurs, à ce sujet, Alexandre Even conserve quelques stigmates. Il n’a rien contre son coéquipier, plus sur la manière dont les choses se sont déroulées. Il en a fait part à son entraîneur Laurent Huard et Yannick Menu, directeur du centre. « J’avais à cœur de leur dire ce que je pensais parce que ça m’avait fait mal... Je me suis senti à l’écart sur les parcours de la Gambardella. Cela m’a foutu un peu les boules, stipule le milieu, titularisé une seule fois au Havre (0-1, 16 janvier 2013). Mais je n’ai pas de regrets. J’ai vécu cinq très belles années au Stade rennais, et si c’était à refaire, je le referais. J’ai aussi beaucoup de bons souvenirs. Humainement et footballistiquement, Rennes c’est bien cadré, il n’y a pas de soucis. Si j’en suis là, et si j’ai bien progressé, c’est aussi grâce à la bonne équipe d’éducateurs en place. » Et il n’y a pas que le football non plus. Appliqué et consciencieux, Alexandre Even, en parallèle du football, a validé un Baccalauréat filière scientifique. Un bagage en plus, au cas où...
« On m’a dit que j’étais un bon joueur... »
À Rennes, difficile de faire son trou. Le milieu de terrain est un des secteurs les plus concurrentiels. Sur les deux dernières fournées, cinq milieux de terrains proviennent du « Made in formation »(Bakayoko, Doucouré, Héry, Hunou et Ngando) avec des profils plus ou moins interchangeables. À partir de ce constat, les chances de toucher le gratte-ciel épousaient les formes de l’illusion, même si Alexandre Even couvait sa saison la plus prometteuse. « Ici, j’ai toujours eu beaucoup de concurrence. Ce ne fut pas toujours facile, mais j’ai toujours répondu présent », concède celui qui avait choisi de venir au Stade rennais en juillet 2009 en signant une convention d’un an, alors que l’AJ Auxerre lui en proposait trois comme aspirant. Les raisons de son « renvoi », le Francilien les connaît. Dans le futur proche, elles lui permettront de s’habiller de neuf, de corriger ce qui ne va pas. « On m’a dit que j’étais un bon joueur, que j’avais fait un excellent parcours à Rennes sur le plan humain et au niveau du football, mais que pour l’exigence du club, il aurait fallu que je sois un très bon joueur pour signer pro. Voilà... »
Ça n’entache pas le reste. Le moment d’effusion à Montaigu en 2010 et le doublé au tournoi des Centres de formation de Ploufragan (2012 et 2013) empiètent son esprit de compétiteur. Il n’oublie pas de mentionner l’esprit de franche camaraderie qui régnait au sein de cette génération 1994, soudée comme les doigts d’une main. D’ailleurs, il n’était pas rare, à la Piverdière, le dimanche, après-midi de match en CFA2, d’en voir quelques-uns se diriger vers les vestiaires après les rencontres. « On était vraiment solidaire entre nous, témoigne Alexandre Even, très proche d’Adrien Hunou. Les cinq pros étaient déçus pour nous. Cela va nous faire bizarre, mais on va profiter de ces derniers moments. Et on se reverra de toute façon... » Un pour tous, tous pour un.
« Rien de concret pour le moment »
Pour l’instant, le téléphone ne sonne pas beaucoup. Hormis un essai prévu dans quelques semaines dans un club de National, c’est le calme plat. Suivi par l’ancien joueur professionnel Jean-Luc Sassus, Alexandre Even est en position d’attente, attentif à la moindre proposition. La crainte de rester à quai le hante, sensation compréhensible quand on est partie prenante d’un marché où la demande est supérieure à l’offre. « Je n’ai rien de concret pour le moment. Ce n’est pas facile à vivre », relate l’ex-joueur de Brétigny, supporter du... FC Nantes (on peut le dire maintenant), club au sein duquel son cousin Romain (1996) a fréquenté le centre de formation. Il ne vise pourtant pas l’impossible, seulement une place dans un effectif de National pour poursuivre une progression qui prenait du volume depuis un an. Les étages supérieurs ? Pourquoi pas, mais ce n’est pas une priorité pour lui. « Aujourd’hui, je pense que j’ai le niveau CFA2. Largement. Si je vais en CFA, je serai forcément déçu mais si je rebondis derrière, c’est le principal. Toutes les solutions sont possibles... » Comme celle de l’apercevoir un jour au plus haut niveau.
Vos réactions (1 commentaire)
Louis G
24 avril 2014 à 06h52Cet article me plait beaucoup car nous avons le témoignage d’un stagiaire du Centre de formation qui a « la tête sur les épaules »...qu’il soit déçu, et c’est normal, de ne pas être retenu par le Stade Rennais ; au lieu de geindre, il met en avant du positif : « j’ai passé 5 bonnes années ; il y a une bonne équipe d’éducateurs... »...je souhaite à Alexandre de réussir, au mieux, dans la voie footballistique qu’il a choisie...si ce n’est pas le cas je ne me fais pas trop de soucis pour ce garçon, qui s’est aussi investi dans sa formation intellectuelle...avec un bac filière scientifique en poche et un tel état d’esprit et de volonté... il n’aura pas beaucoup de difficultés, à mon avis, à trouver un employeur (ou des employeurs) dans les mois et années à venir !...